Bioventure
L’énorme augmentation des cas de réactions allergiques depuis 1990 concorde avec l’usage croissant de produits à base de soja dans les aliments transformés. Cette réalité constitue un sérieux problème de santé publique, malgré les efforts des lobbies industriels pour l’en exonérer.
Multiplication des cas d’allergies au soja
Le soja est l’une des premières substances allergènes. Dans les années 1980, Smart Berger, docteur en médecine, classa le soja sur la liste noire des sept principaux allergènes. À l’époque, la plupart des spécialistes plaçaient le soja en dixième ou onzième position, loin derrière l’arachide et autres noix, le lait, les œufs, les mollusques et crustacés, le poisson et le blé.
Aujourd’hui, il est communément reconnu comme l’un des “huit grands allergènes” provoquant des réactions d’hypersensibilité immédiates.
Les allergies sont des réactions inflammatoires anormales du système immunitaire à la poussière, au pollen, à un aliment ou à quelque autre substance.
Celles qui impliquent un anticorps appelé immuno-globuline E (IgE) surviennent instantanément ou dans l’heure qui suit et peuvent se traduire par une toux, des éternuements, une hydrorrhée nasale, de l’urticaire, une diarrhée, un oedème du visage, un essoufflement, un gonflement de la langue, des problèmes de déglutition, une chute de la tension artérielle, une transpiration excessive, un évanouissement, un choc anaphylactique ou même la mort.
Les réactions allergiques tardives au soja sont moins spectaculaires mais encore plus courantes. Elles sont provoquées par des anticorps connus sous le nom d’immunoglobulines A, G ou M. (IgA, IgG ou IgM) et se produisent dans un délai de deux heures à quelques jours après consommation de l’aliment.
Elles sont associées à des troubles du sommeil, une énurésie, des infections des sinus et des oreilles, une agitation, des douleurs articulaires, une fatigue chronique, des ennuis gastro-intestinaux et autres symptômes mystérieux.
Même si les “intolérances”, “sensibilités” et “idiosyncrasies” au soja sont généralement appelées “allergies alimentaires”, elles diffèrent des véritables allergies en ce sens qu’elles ne sont pas dues à des réactions du système immunitaire mais à des mécanismes métaboliques peu ou pas connus.7^9 A strictement parler, les gaz et les ballonnements – réactions fréquentes au soja et à d’autres graines de haricot – ne sont pas de réelles réactions allergiques. Toutefois, ces signes peuvent alerter sur l’éventualité d’un portrait clinique plus vaste impliquant des dégâts gastro-intestinaux liés à des allergènes.
Profit contre Risque
L’industrie du soja sait que des gens souffrent de graves réactions allergiques à ses produits. Dans une récente requête adressée à l’administration de contrôle pharmaceutique et alimentaire des États-Unis (FDA), Protein Technologies International (PTI) a identifié “l’allergénicité” comme l’un des “effets négatifs potentiels les plus probables de l’ingestion de grandes quantités de produits à base de soja”. Pourtant, PTI a réussi à conclure, on ne sait comment, que “les données ne prouvaient en aucune façon qu’ils pourraient constituer une menace importante pour la santé de la population américaine”.
Cette déclaration n’est guère rassurante pour les nombreux enfants et adultes souffrants d’allergies aux produits à base de soja.
En outre, elle ignore la forte accumulation de preuves publiées durant les années 1990 qui montre que certaines de ces personnes découvrent leur hypersensibilité après avoir subitement souffert d’une réaction grave, voire potentiellement fatale.
Les réactions sévères au soja sont rares, comparées à celles provoquées par l’arachide et autres noix, le poisson ou les crustacés, mais des chercheurs suédois ont récemment conclu que “l’on avait sous-estime le rôle du soja dans l’anaphylaxie alimentaire” (Foucard T., Malmheden Yman, I., Allergy 1999, 53 (3): 261-265).
Fatals hamburgers
Les Suédois ont commencé à étudier le rôle éventuel du soja après qu’une crise d’asthme eut emporté une jeune fille alors qu’elle venait de manger un hamburger contenant seulement 2,2 % de protéines de soja. Une équipe de chercheurs rassembla des données sur toutes les réactions fatales ou potentiellement fatales provoquées par des aliments entre 1993 et 1996 en Suède et découvrit que le cas du hamburger au soja n’était pas une exception et que ce produit était bel et bien en cause. En évaluant 61 cas de graves réactions alimentaires, dont cinq se sont avérés fatals, ils ont découvert que le soja, l’arachide et autres noix étaient à l’origine de 45 des 61 réactions. Sur les cinq décès, quatre ont été attribués au soja. Les quatre enfants morts du soja souffraient d’allergies connues à l’arachide mais pas au soja. La quantité de soja consommée allait d’un à dix grammes – quantité habituellement présente lorsque la protéine de soja est utilisée comme liant protéique végétal dans les aliments cuisinés tels que les hamburgers, les boulettes de viande, les sauces à spaghetti, les kebabs et les saucisses ou bien comme allongeur dans le pain et les pâtisseries.
Quand le soja est “caché” dans des hamburgers et autres aliments “ordinaires”, les gens ne font pas le lien. De plus les réactions allergiques au soja ne surviennent pas toujours immédiatement, rendant la cause et l’effet encore plus difficiles à identifier.
Comme l’a indiqué cette étude suédoise, aucun symptôme – même très léger – n’est apparu dans les 30 à 90 minutes après la consommation de l’aliment contenant du soja; puis les enfants ont eu une crise d’asthme fatale. TOUS avaient déjà mangé du soja sans aucune réaction indésirable jusqu’au dîner ayan^ entraîné leur mort.
L’étude suédoise n’est pas la première à avoir rapporté des “réactions fatales” liées au soja. Même si l’anaphylaxie alimentaire est le plus souvent associée à une consommation d’arachide et autres noix, de crustacés et parfois de poisson ou de lait, le soja a son propre casier judiciaire. Les réactions anaphylactiques au pain, aux pizzas ou aux saucisses allongés avec de la protéine de soja remontent au moins à 1961. Des études ultérieures ont confirmé que, bien que rare, le risque n’en était pas moins réel.
La quantité croissante de soja “caché” dans les produits alimentaires est incontestablement responsable du déclenchement de nombreuses réactions allergiques non attribuées au soja. Des chercheurs français ayant étudié la fréquence des chocs anaphylactiques dus à des aliments ont rapporté que dans 25 % des cas l’allergène alimentaire n’était pas identifié. Ils ont noté la prévalence d’allergènes alimentaires “cachés” et “masqués” et ont constaté “une prévalence incroyablement accrue de choc anaphylactique dû aux aliments en 1995 par rapport à une étude antérieure datant de 1982″.21 Cette période coïncide avec une énorme augmentation de la quantité de protéines de soja ajoutée aux aliments transformés (en fait, cette quantité a continué à augmenter. La consommation quotidienne de protéine de soja par habitant est passée de 0,78 g en 1998 à 2,23 g en 2002, selon des estimations de l’industrie du soja obtenues par la Solae Company qui, en mars 2004, a déposé une requête auprès de la FDA afin que celle-ci reconnaisse les propriétés anticancéreuses de la protéine de soja.21a).
Aucune de ces études n’a suscité beaucoup d’intérêt de la part des médias. Les organismes de santé n’ont publié aucune mise en garde. Par exemple, Ingrid Malmheden Yman, PhD, de l’administration nationale suédoise des aliments et co-auteur de l’étude, a écrit au Ministère de la Santé de Nouvelle-Zélande à la demande d’une personne allergique. Deux ans avant que l’article (d’abord publié en Suède) ne paraisse en Angleterre, elle informa le ministère que les enfants souffrant de graves allergies à l’arachide devraient éviter de consommer de la protéine de soja. Pour plus de précautions, elle recommanda également aux parents de s’efforcer “d’éviter toute sensibilisation” en limitant la consommation d’arachide et de soja durant les trois derniers mois de grossesse et durant l’allaitement au sein. Elle a par ailleurs déconseillé l’usage de lait maternisé pour bébé à base de soja.
Le débat fait rage depuis les années vingt sur la question de savoir si les bébés sont ou non sensibilisés à des allergènes alors qu’ils se trouvent encore dans l’utérus de la mère. En 1976, des chercheurs ont découvert que le foetus était capable de produire des anticorps IgE contre la protéine de soja durant les premiers stades de la grossesse et que les nouveau-nés pouvaient être tellement sensibilisés par l’intermédiaire du lait maternel qu’ils réagissaient plus tard à des aliments qu’ils n’avaient “jamais consommés”.
Les familles devant prendre le plus de précautions sont celles qui souffrent d’allergies connues à l’arachide et/ou au soja, celle dont la mère végétarienne serait tentée de consommer beaucoup d’aliments au soja pendant la grossesse ou l’allaitement et enfin les parents qui envisagent d’utiliser du lait maternisé à base de soja.
Le nombre d’enfants présentant des allergies à l’arachide étant en constante augmentation, il faut s’attendre à voir un plus grand nombre d’enfants et d’adultes souffrir de graves réactions au soja. L’arachide et le soja font partie de ta même famille botanique, celle des légumineuses à grains, et les scientifiques savent depuis des années que les gens allergiques à l’une de ces deux substances s’avèrent souvent allergiques à l’autre.
Parmi les autres enfants risquant de présenter une allergie au soja non détectée mais potentiellement fatale figurent ceux qui sont allergiques aux pois, haricots de Lima ou autres graines de haricot, les asthmatiques, les enfants atteints de rhinite, d’eczéma ou de dermatite ou ceux ayant dans leur famille des personnes présentant des antécédents de toutes ces maladies.
Les réactions à des aliments appartenant à la même famille botanique peuvent se cumuler, entraînant des symptômes bien plus graves qu’ils ne le seraient isolément.
Les protéines allergènes du soja
Les scientifiques ne savent pas avec certitude quels sont les composants du soja responsables des réactions allergiques. Ils ont découvert au moins 16 protéines allergènes et certains en ont même identifié 25 ou 30. Les laboratoires indiquent que le système immunitaire réagit à de multiples fractions de la protéine de soja, aucune fraction n’étant plus antigénique qu’une autre, c’est-à-dire capable de déclencher la production d’un anticorps.
Les fractions les plus allergènes semblent être les inhibiteurs de la trypsine de Kunitz et Bowman-Birk. L’industrie agro-alimentaire a tenté en vain de désactiver complètement ces protéines embarrassantes sans causer de dommages irréparables au restant de la protéine de soja. Faute d’avoir réussi, l’industrie du soja a décidé de vanter les propriétés anticancéreuses de ces “facteurs anunutritionnels”. À ce jour, les preuves de telles vertus sont minces mais les statistiques sur le cancer risquent effectivement de s’améliorer si suffisamment de gens meurent d’un choc anaphylactique avant d’avoir le temps de mourir du cancer.
Bien qu’extrêmement rares, des cas de décès dus à une réaction allergique à un inhibiteur de la trypsine ont été publiquement signalés depuis le reportage paru dans le New England Journal of Médiane en 1980.
L’inhibiteur de Kunitz a été identifié comme l’un des trois composants allergènes de la lécithine de soja – produit souvent considéré hypoallergénique (c’est-à-dire n’ayant qu’un risque réduit de provoquer une réaction allergique) parce qu’il n’est pas censé contenir des protéines de soja mais en présente pourtant invariablement des traces.
La lectine de soja – autre facteur antinutritionnel aujourd’hui présenté comme un gage de bonne santé – a également été reconnue comme une substance allergène.40 Chaque fois que la paroi intestinale est détériorée (“intestin qui fuit”), les lectines de soja peuvent passer facilement dans le sang, déclenchant ainsi des réactions allergiques (voir chapitre Xiv). À vrai dire, cela est très probable parce que tant les allergènes du soja que les saponines (facteurs antinutritionnels) sont susceptibles d’endommager les intestins.
L’intoxication à l’histamine peut s’apparenter à une réaction allergique. Chez les personnes allergiques, les mastocytes libèrent de l’histamine, déclenchant une- réaction ressemblant fortement à une allergie alimentaire. Dans le cas d’une intoxication à l’histamine, cette dernière se trouve directement dans les aliments. On l’associe le plus souvent à des réactions au fromage et au poisson mais la sauce de soja en contient également des taux élevés. Les chercheurs qui ont calculé la teneur en histamine des aliments consommés lors d’un repas oriental typique indiquent qu’elle peut facilement frôler les seuils toxiques.
Questions de tranformation
La façon dont le soja est cultivé, récolté, transformé, stocké et cuisiné peut affecter son allergénicité. Les graines de soja crues sont les plus allergéniques, tandis que les produits fermentes à la mode d’autrefois (miso, tempeh, natto, shoyu et tamari) sont les produits les moins allergènes. Les aliments modernes à base de protéine de soja transformés sous l’effet de la chaleur, de la pression ou de solvants chimiques perdent une partie de leur allergénicité mais pas l’intégralité. Les protéines partiellement hydrolysées et les pousses de soja, qui ne sont que rapidement ou sommairement transformées, demeurent très allergéniques.
Le bulletin d’information de l’industrie du soja. Thé Soy Connection, affirme que la lécithine et les huiles très raffinées “ne présentent aucun danger pour les consommateurs allergiques au soja”.
Malheureusement, bon nombre de personnes ayant cru à ces nouvelles rassurantes se sont retrouvées à l’hôpital. Les gens hypersensibles ne peuvent consommer ni l’une ni l’autre de ces substances. Les réactions indésirables aux huiles de soja – ingérées soit par la bouche soit par sonde – vont de simples éternuements à un risque fatal de choc anaphylactique.
Si la lécithine et l’huile de soja ne contenaient absolument pas de protéine de soja, elles ne provoqueraient pas de symptômes allergiques. Les différentes conditions et méthodes de transformation – sans parler des disparités d’un contrôle qualité à un autre – selon lesquelles l’industrie des huiles végétales sépare la protéine de soja de l’huile rendent la présence de traces de protéine de soja possible, voire probable. Bien que plus saines à de nombreux égards, les huiles de soja pressées à froid vendues dans les magasins de produits diététiques peuvent s’avérer mortelles pour une personne allergique. Elles sont susceptibles de présenter une teneur en protéine jusqu’à 100 fois supérieure à celle des huiles de soja très raffinées vendues en supermarché.
La margarine risque, elle aussi, de contenir de la protéine de soja. Outre les protéines égarées ayant pu subsister après la transformation de l’huile de soja, les isolats ou concentrais de protéine de soja sont fréquemment utilisés par l’industrie alimentaire pour améliorer la texture ou la tartinabilité de ces produits, notamment des allégés ou de ceux “pauvres en acides gras trans”.
Un danger caché
Les personnes allergiques à la protéine de soja sont en danger permanent. Des milliers d’aliments courants, cosmétiques et produits industriels tels que l’encre, le carton, les peintures, les voitures et les matelas renferment du soja sans qu’on le sache. Les quatre décès enregistrés en Suède ne sont que les cas signalés les plus connus des milliers de personnes ayant souffert de graves réactions allergiques au soja après avoir consommé par inadvertance des aliments en contenant.
Sur les 659 produits alimentaires rappelés par la FDA en 1999, 236 (36 %) ont été retirés du marché car ils comportaient des allergènes non déclarés. Les trois facteurs responsables des allergènes non déclarés étaient: des omissions et des erreurs sur les étiquettes (51 %), une contamination croisée par le biais du matériel de fabrication (40 %) et des erreurs commises par les fournisseurs des ingrédients (5 %). Toutefois, ce ne sont pas des inspecteurs mais bien des consommateurs américains en colère qui ont mis le doigt sur 56 % des allergènes non déclarés.
En 2002, l’Agence canadienne d’inspection des aliments (CFIA), qui prend les allergies au soja très au sérieux, a rappelé des beignets, pains mollets, pizzas et autres produits contenant de la protéine de soja non déclarée58 Bien que les agences de nombreux pays affirment intensifier leurs efforts pour mettre en vigueur les lois relatives à l’étiquetage, il est difficile, de faire appliquer les réglementations même lorsque les autorités en font une priorité. Le principal problème est qu’il existe peu de méthodes fiables pour détecter et quantifier de minuscules quantités d’allergènes dans les aliments.
Et même lorsque les ingrédients contenant du soja figurent en détail sur les étiquettes des aliments, les consommateurs peuvent facilement passer à côté. Une étude réalisée en 2002 sur 91 parents d’enfants allergiques à l’arachide, au lait, aux œufs, au soja et/ou au blé a révélé que la plupart des parents n’identifiaient pas les ingrédients alimentaires allergéniques correctement et que les principaux problèmes venaient du lait et du soja. Seulement 22 % des parents confrontés à une allergie au soja sont parvenus à identifier correctement la protéine de soja dans sept produits. Selon les conclusions des chercheurs, “ces résultats traduisent la nécessité d’un meilleur étiquetage en termes simples et de mises en garde contre les allergènes ainsi que le besoin urgent d’apprendre à décoder les étiquettes”
Purifier l’air
Les réactions allergiques surviennent non seulement en cas de consommation de soja mais aussi en cas d’inhalation de farine ou de poussière de soja. Chez les épidémiologistes, la poussière de soja est reconnue comme un “agent déclencheur de l’asthme épidémique”. De 1981 à 1987, la poussière de soja issue d’un silo à grains se déversant dans le port de Barcelone, en Espagne, a provoqué 26 épidémies d’asthme, mettant gravement en péril la santé de 687 personnes et entraînant 1155 hospitalisations. Aucune autre épidémie ne s’est déclarée après l’installation de filtres mais un petit pic d’asthme en 1994 a révélé le besoin d’un contrôle assidu des mesures préventives.
Les événements de Barcelone ont conduit des épidémiologistes de la Nouvelle-Orléans à examiner les cas d’asthme épidémique survenus de 1957 à 1968, période où plus de 200 personnes étaient venues recevoir un traitement au Charity Hospital. Les investigations sur les conditions atmosphériques et les détails du fret du port de la Nouvelle-Orléans ont identifié la poussière de soja issue des bateaux transportant du soja comme la cause probable. Aucun lien n’a été décelé entre les jours où s’est déclenché l’asthme épidémique et la présence de blé ou de maïs sur les bateaux du port. Selon les chercheurs, “les résultats de cette analyse offrent de nouvelles preuves montrant que la poussière de soja ambiante est très asthmogénique et que la morbidité de l’asthme d’une communauté peut être influencée par des expositions à l’atmosphère ambiante”.
La première allusion à l’”asthme professionnel” est apparue dans le Journal of Allergy en 1934. W. W. Duke a décrit le cas de six personnes dont l’asthme avait été déclenché par la poussière provenant d’une usine de traitement de soja voisine et a prédit que le soja pourrait devenir une cause majeure d’allergie à l’avenir.64 Aujourd’hui, la poussière de soja est reconnue comme un risque professionnel pour tous ceux qui travaillent dans les boulangeries, les usines de fabrication d’aliments pour animaux, les usines de transformation des produits alimentaires, les magasins de produits diététiques et les coopératives dotées de cellules de stockage en vrac.
Les explosions dues à la poussière constituent un risque d’accident au sein des usines de transformation du soja.
La plupart des victimes développent leur “asthme professionnel” sur une certaine période. Dans un cas bien documenté, une femme de 43 ans a travaillé six ans dans une usine de transformation des aliments, dans laquelle la farine de soja était utilisée comme allongeur de viande, avant de développer de l’asthme. Les symptômes (éternuemems, toux, respiration sifflante) apparaissaient dans les minutes suivant l’exposition à la farine de soja et disparaissaient deux heures après la fin de l’exposition.
De rares réactions au soja ont été observées chez des patients asthmatiques utilisant des inhalateurs bronchodilatateurs contenant des excipients à base de soja. Des patients ne souffrant pas d’allergie au soja par ailleurs ont présenté des bronchospasmes accompagnés de laryngospasmes et d’éruptions cutanées.
Trucage des statistiques sur le lait de soja maternisé
Pendant des années, l’industrie du soja a qualifié le lait maternisé à base de soja d’”hypoallergénique”. Dans son manuel de 1961, Infant Foods and Feeding Practice, Herman Frédéric Meyer, MD, du Département de Pédiatrie de la faculté de médecine de l’Université Northwestern, à Chicago, a désigné les laits maternisés à base de soja comme des “préparations hypoallergéniques”, en citant en exemple les produits Mull Soy, Sobee, Soyalac.
Au fil des ans, l’industrie du soja a encouragé ce type de désinformation dans la publicité, l’étiquetage et la littérature éducative, en ignorant les études valables au profit d’études non pertinentes basées sur des cochons d’Inde.
En 1989 encore, John Erdman, PhD, chercheur mis à l’honneur pzr l’industrie du soja en 2001 pour ” avoir remarquablement contribué à une meilleure compréhension et à un plus grande prise de conscience des bienfaits pour la santé des produits à base de soja et des constituants du soja “, a revendiqué l’ “hypoallergénicité ” du soja dans l’american journal of clinical Nutrition. Une lettre ultérieurement adressée à l’éditeur a rectifié ces informations erronées.
Aujourd’hui, l’industrie du soja a révisé sa position quant à l’hypoallergénicité du soja en y mettant un bémol. Cela s’est avéré relativement facile car personne ne semble connaître le nombre exact de personnes allergiques au soja.
On dispose au mieux d’évaluations approximatives résultant du décompte des diagnostics d’allergie recouvrant aussi bien des crachats, des comportements agités, des coliques et des vomissements observés par les parents que des signes biochimiques détectés grâce aux techniques RAST et ELISA, en passant par des défis cliniques et des régimes d’élimination.
Beaucoup de tests n’étant pas fiables à cent pour cent et les données non scientifiques ayant tendance à être prises à la légère, de nombreux cas ne sont pas comptabilisés. Les chiffres cités dépeignent le plus souvent 0,3 à 7,5 % de la population comme allergique au lait de vache et 0,5 à 1,1 % comme allergique au soja. Toutefois, les preuves laissent penser que la protéine de soja est au moins aussi antigénique que la protéine du lait, surtout lorsque l’on tient compte des plaintes gastro-intestinales et des réactions d’hypersensibilité de type retardé.
Sur le site Internet de l’industrie du soja “Soy and Human Heaith”, Clare Hasier, PhD, de l’Université d’Illinois à Urbana-Champaign, reprend le chiffre peu élevé de 0,5 % et affirme que la protéine de soja se classe au 11e rang en termes d’allergénicité alimentaire.
C’était peut-être vrai dans les années 1970 (sa source date de 1979) mais aujourd’hui le soja est communément reconnu comme l’un des “huit grands allergènes”.
En vérité, un chercheur de premier plan classe même le soja parmi les “six premiers” et un autre parmi les “quatre premiers aliments” provoquant des réactions d’hypersensibilité chez les enfants.
Le lait maternisé à base de soja est loin d’être la meilleure solution pour les bébés allaités au biberon qui sont allergiques aux préparations lactées classiques. Les phytoestrogènes contenus dans le soja peuvent interférer sur le bon développement de la thyroïde, du cerveau et du système reproducteur du bébé. Le lait maternisé au soja ne constitue pas non plus la solution idéale à l’allergie au lait de vache.
Diarrhées, ballonnements, vomissements et éruptions cutanées disparaissent parfois lorsque le lait de vache est remplacé par du lait au soja, mais le soulagement n’est souvent que temporaire. Dans de nombreux cas, les symptômes reviennent en force une ou deux semaines plus tard.
Comme l’écrit le D’ Stefano Guandalini, du Département de pédiatrie de l’Université de Chicago, “un nombre significatif d’enfants présentant une intolérance à la protéine du lait de vache développe une intolérance à la protéine de soja lorsque l’on introduit du lait au soja dans leur alimentation”.
Ce qui est très intéressant, c’est que les chercheurs ont récemment détecté et identifié un composant de la protéine de soja qui réagit de façon croisée avec les caséines du lait de vache.86 Les réactions croisées se produisent lorsque des aliments sont chimiquement liés les uns aux autres.
Des réactions défavorables provoquées par les laits maternisés au soja surviennent chez au moins 14 à 35 pour cent des bébés allergiques au lait de vache, selon le D’ Matthias Besler d’Hambourg, en Allemagne, et l’équipe internationale d’allergologues qui l’a aidé à mettre en place le site Internet informatif, http://www.food-allergens.de/contents-2000.html.87
Le site fort utile du D” Guandalini, http://www.emedicine.com/ped/topic2128.htm, rapporte les résultats d’une étude non publiée portant sur 2108 bébés et jeunes enfants italiens, parmi lesquels 53 % des bébés de moins de trois mois ayant mal réagi au lait de vache présentaient également des réactions au lait de soja. Bien que les spécialistes attribuent généralement ce fort taux de réactivité au tube digestif immature – donc vulnérable – des bébés, cette étude a montré que 35 % des enfants de plus d’un an qui étaient allergiques à la protéine du lait de vache développaient également une allergie à la protéine de soja. En tout, 47 % ont été obligés d’arrêter le lait au soja.
Tant de bébés allergiques au lait de vache sont également allergiques au lait de soja que les chercheurs ont commencé à conseiller aux pédiatres de cesser de recommander le lait au soja et de prescrire plutôt des préparations lactées à base de caséine hydrolysée hypoallergénique ou de lactosérum.
Une étude réalisée sur 216 bébés fortement susceptibles de développer des allergies a révélé des taux comparables d’eczéma et d’asthme qu’ils boivent du lait de vache ou du lait au soja moins “allergénique”.
À la lumière de cette étude, le message était clair: seul “l’allaitement exclusif au sein ou l’allaitement partiel avec un lait à base d’hydrolysat de lactosérum garantit une faible incidence de maladies atopiques et d’allergies alimentaires. C’est une approche profitable de la prévention des maladies allergiques chez les enfants”.
Personne ne peut affirmer que le lait maternisé au soja est hypoallergénique mais beaucoup disent pourtant que les protéines qu’il contient sont peut-être moins allergéniques que celles du lait de vache. Lorsque des bébés développent une intolérance au soja, on a tendance à mettre cela sur le compte des dégâts préalablement occasionnés sur les intestins par la protéine du lait de vache.
Certains médecins recommandent donc le lait de soja dès la naissance mais cela n’empêche pas de développer des allergies alimentaires.
Comme l’explique C. D. May, du NationalJe wish Hospital and Research Center à Denver, “Donner du lait au soja dès la naissance pendant 112 jours n’a pas empêché une vive réponse anticorps au lait de vache introduit ultérieurement, comparable ou supérieure à celle observée lorsque le bébé avait été nourri au lait de vache dès sa naissance”.
Désordres intestinaux
Les gens chez qui l’on diagnostique une “colite allergique” souffrent de diarrhées sanglantes, d’ulcérations et de lésions des tissus, en particulier sur la zone sigmoïde du côlon descendant. Chez les bébés, la première cause en est une allergie au lait de vache, mais 47 à 60 % de ces bébés réagissent de façon similaire au lait au soja. Chose curieuse, des modifications inflammatoires de la muqueuse des intestins apparaissent même chez des bébés qui semblent supporter le soja: pas de diarrhée, pas d’urticaire, pas de sang dans les selles ou autre signe évident d’allergie. Une étude a montré que des réactions cliniques survenaient chez 16 % des enfants nourris au lait de soja, mais que des lésions intestinales histologiques et enzymologiques se produisaient chez 38 % de plus de ces enfants. Une observation au microscope et des analyses sanguines ont révélé que ce second groupe présentait des lésions sur les cellules et les tissus de l’intestin, indiquant des taux accrus de xylose (sucre indigérable permettant de diagnostiquer “un intestin qui fuit” et autres troubles intestinaux). Les chercheurs ont également découvert des taux insuffisants de sucrase, de lactase, maltase et de phosphatase alcaline – preuves que la faculté de digestion des bébés était compromise, que leur niveau de stress était accru et que leur système immunitaire était mis à l’épreuve.
La plupart des problèmes gastro-intestinaux liés au lait maternisé au soja impliquent des réactions immunitaites non-IgE retardées.
Toutefois, des réactions IgE locales peuvent y contribuer en entraînant la formation de complexes immuns qui altèrent la perméabilité de la muqueuse intestinale. Comme l’a expliqué C. Carini, le principal auteur de l’étude Annals ofAllergy publiée en 1987, “Les symptômes à apparition retardée qui en résultent pourraient être considérés comme une forme de maladie sérique affectant plus ou moins d’organes cible".
L’intestin grêle du bébé est particulièrement vulnérable.
Une microscopie électronique à balayage et des biopsies ont révélé de graves lésions de l’intestin grêle, parmi lesquelles un aplatissement et une atrophie des projections en forme de doigts (connues sous le nom de villosités) et une hyperplasie des puits (connus sous le nom de cryptes). La réaction allergique n’est peut-être pas seule en cause ici, puisque la destruction observée concorde avec celle provoquée par les facteurs antinutritionnèls du soja connus sous le nom de lectines et saponines, les lectines jouant peut-être aussi le rôle de protéines allergiques. Les villosités sont les projections tapissant toute la surface muqueuse de l’intestin grêle où s’effectue l’absorption des nutriments. L’aplatissement et l’atrophie de ces villosités entraînent une malnutrition et un retard de croissance, avec un portrait clinique très similaire à celui observé chez les enfants et les adultes souffrant de la maladie coeliaque.
La maladie coeliaque est un grave syndrome de malabsorption, le plus souvent associé au gluten (fraction protéique présente dans le blé et quelques autres céréales) et à une intolérance au lait. Peu de personnes savent que le soja peut également être en cause. Certains adultes atteints de la maladie coeliaque souffrent de diarrhée, maux de tête, nausées et flatulences même lorsqu’ils suppriment le gluten de leur alimentation et consomment de minuscules quantités de soja. Une étude réalisée sur 98 enfants et bébés présentant de multiples allergies gastro-intestinales a révélé que 62 % étaient allergiques à la fois au soja et au lait et que 35 % étaient allergiques à la fois au soja et au gluten.
Surmonter les allergies au soja
Les allergologues affirment que la “plupart” des jeunes enfants “surmontent” leurs sensibilités.100 Cela est logique – dans une certaine mesure. Si les bébés développaient une allergie au soja parce que leur tube digestif et leur système immunitaire étaient immatures, le risque de voir apparaître une allergie au soja diminuerait avec l’âge et de nombreux enfants verraient leur allergie disparaître en grandissant. Or d’autres études – pourtant réalisées par les mêmes auteurs – révèlent que seule une minorité de sujets surmonte cette intolérance.
Une étude a montré que seuls 26 % des enfants souffrant d’allergies au soja, à l’œuf, au lait, au blé et à l’arachide perdaient leur hypersensibilité après l’âge d’un an. Bien que l’arachide -parent du soja encore plus allergénique- ait pu fausser ces résultats, une autre étude a démontré que seuls deux bébés sur huit surmontaient leur allergie au soja après 25 mois.
Et de nombreux enfants ayant surmonté “avec succès” leurs allergies alimentaires développent des allergies respiratoires. Une étude menée sur 322 enfants a montré que seuls 6 % souffraient encore de sensibilité alimentaire après cinq ans, mais que 40 % de ces enfants “se mettaient à présenter” des allergies respiratoires. Cela valait pour le lait, l’oeuf, le chocolat, le soja et les céréales, dans cet ordre précis.104 Toutefois, cette étude est souvent citée pour prouver que la plupart des enfants surmontent “avec succès” leurs allergies.
Les enfants ont davantage de chances de surmonter leurs allergies au lait de vache ou au soja que celles à l’arachide, au poisson ou aux crevettes, mais continueront à réagir à ces aliments s’ils en consomment assez souvent. Or le traitement de ces allergies exige l’exclusion totale de l’aliment incriminé. L’entérocolite provoquée par le soja, par exemple, disparaîtra après six mois à deux ans de suppression totale du soja.
Comme ne le savent que trop bien les familles des enfants allergiques, bannir le soja des dîners familiaux ou des repas et en-cas fournis dans les garderies et les écoles peut s’avérer une véritable gageure.
Même chez les non-végétariens, le soja est omniprésent dans les aliments transformés. Par conséquent, la sensibilisation au soja a augmenté, n’est pas nécessairement surmontée avec l’âge et peut resurgir ou apparaître plus tard dans la vie.
Le frankensoja ou soja transgénique
Si les allergies au soja sont en augmentation, c’est peut-être aussi la faute des graines de soja génétiquement modifiées. Au Royaume-Uni, le York Nutritional Laboratories, l’un des premiers laboratoires européens spécialisés dans la sensibilité alimentaire, a constaté une hausse de 50 % des allergies au soja en 1998, année où les graines de soja génétiquement modifiées ont fait leur apparition sur le marché mondial. Les chercheurs de York ont noté que l’une des 16 protéines des graines de soja les plus susceptibles de provoquer des réactions allergiques était présente à des concentrations de 30 % ou plus dans les graines de soja génétiquement modifiées de Monsanto. Ils ont envoyé leurs découvertes au Ministre britannique de la Santé Frank Dobson, exhortant le gouvernement à agir en conséquence et à interdire immédiatement les aliments génétiquement modifiés, le temps d’effectuer de nouveaux tests d’innocuité. Le D’ Michael Antonion, pathologiste moléculaire du Guy’s Hospita\cf2 }, dans le centre de Londres, a fait remarquer : “II s’agit d’une information très intéressante, bien que légèrement inquiétante. Cela révèle qu’il reste encore beaucoup à faire pour évaluer l’innocuité de ces aliments. Pour l’instant, la commercialisation des aliments génétiquement modifiés ne requiert aucun test immunologique préliminaire, point sur lequel il faudrait sérieusement se pencher.”
Les personnes allergiques aux graines de soja génétiquement modifiées ne sont peut-être même pas allergiques au soja ordinaire. Il n’est pas exclu que les coupables soient des protéines étrangères introduites dans les graines de soja. Les allergiques à la noix du Brésil mais pas au soja ont présenté des allergies aux graines de soja génétiquement modifiées dans lesquelles on avait inséré des protéines de noix du Brésil afin d’augmenter le taux de méthionine et d’améliorer le profil global du soja en termes d’acides aminés.
Les scientifiques affirment que ces problèmes peuvent être évités en réalisant des études sur les liaisons de l’IgE, en expliquant les caractéristiques physicochimiques des protéines et en consultant les bases de données des allergènes connus.
Cela aurait pu permettre de déceler le problème des noix du Brésil, mais il n’existe aucun moyen d’évaluer le risque d’une nouvelle sensibilisation, qui survient lorsque des expériences génèrent de nouveaux allergènes.
A PROPOS DE L’AUTEUR
Kaayla T. Daniel, PhD, CCN, est l’auteur de TheWhole Soy Story: Thé Dark Side ofAmenca ’s Favorite Heaith Food (NewTrends Publishing, 2004). Nutritionniste clinicienne diplômée et éducatrice sanitaire, elle donne des cours et anime des ateliers sur la prévention des maladies et les moyens de jouir d’une santé et d’une longévité optimales.
Vous pouvez entrer en contact avec elle via son site Internet, http://www.wholesoystory.com. .
NOTE DE L’EDITEUR
En raison du manque de place, nous ne pouvons pas publier les notes de fin de cet article. Les lecteurs intéressés peuvent les consulter sur notre site Internet, http://www.nexusmagazine.com, ou en demander une copie à n ‘importe quel bureau NEXUS.
Sources SIGNES DES TEMPS
Posté par Adriana Evangelizt